Audiologie : Un chemin plus complexe que prévu
Audiologie : Un chemin plus complexe que prévu
Par Marianne Laforte
Rédaction : 2017-05-21
Révision : 2025-02-16
En parallèle à nos démarches en orthophonie, je faisais également des recherches pour pouvoir évaluer son ouïe. Cette fois-ci, l’expérience s’est révélée encore intense, à l'image de ma Yéyé ;).
Le Centre intégré en santé et services sociaux (CISSS) m’a dirigée vers l’hôpital régional ou vers le privé.
Essai en clinique privée : un vrai parcours du combattant
J’ai donc tenté d’abord le privé, pour éviter l’attente. J’ai pris rendez-vous dans une clinique près de chez moi. Le délai fut tout à fait raisonnable : le rendez-vous était à 16 h, après la journée de garderie de mademoiselle. Je savais déjà que le processus serait rock'n roll.
Le niveau d’énergie de Yéyé, à cette heure-là, est inversement proportionnel à son niveau d’attention. Mais bon, il faut ce qu’il faut, comme on dit, et je devais coordonner le tout à travers mon horaire professionnel et les disponibilités de la clinique. Ce qui était déjà tout un contrat.
Donc, nous voilà arrivées à la clinique.
Chaque sortie : une épreuve en soi
À peine arrivées, j’étais déjà épuisée. La clinique se trouvant à l’intérieur d’un centre médical, il nous a fallu traverser la salle d’attente et trouver le bon local.
Ça a l’air simple dit comme ça, mais à cette époque, il était plutôt rare que Yéyé me tienne la main. J’étais soit en train de courir derrière elle en l’appelant pour qu’elle ralentisse, soit en train de la supplier de me suivre, car elle avançait à une lenteur exaspérante.
Toutes les sorties étaient compliquées.
Dès que j’essayais de lui prendre la main, elle devenait molle comme une guenille ou se mettait à faire le bacon. Sinon, elle refusait simplement ma main, et je courais derrière elle. Toute une collaboration!
J’avais probablement l’air d’une vraie folle (je sais, ce n’est pas politiquement correct, mais il faut avoir croisé les regards dans ces moments-là pour comprendre) : mon enfant ne m’écoutait pas, je m’époumonais, et je courais après elle en tentant de ne pas perdre le fil de notre expédition.
Après la traversée du stationnement et le dédale des corridors du centre médical, nous finissons enfin par arriver à la clinique.
Yéyé commence aussitôt à se déshabiller, enlevant manteau, bottes et bas. Et surtout, n’essayez pas de les lui remettre, à moins que ce ne soit pour repartir. Elle est à l’aise pieds nus, peu importe la slush brune, la garnotte au sol et les joies hivernales du Québec.
Pendant que j’annonçais notre arrivée à la réceptionniste, je gérais les vêtements éparpillés de Yéyé, qui, elle, testait tous les sièges de la salle d’attente : debout pour atteindre un cadre ou un interrupteur, ou encore derrière le bureau pour fouiller les tiroirs ou déchirer des dessins d’enfants. Sinon, elle se couchait par terre pour protester pendant que j’essayais de la retenir près de moi.
Et nous n’étions même pas encore rendues au rendez-vous...
On vient ici pourquoi déjà ?
Un rendez-vous… ou un marathon
L’objectif : faire collaborer Yéyé. Mais elle ne répondait pas aux consignes de la technicienne qui tentait de ralentir son rythme. Ce qui, pour elle, est déjà un exploit.
La spécialiste, seule dans sa salle de commande, me laisse dans la salle de test avec l’enfant. Mademoiselle ne participe tout simplement pas. Nous ne pouvons pas procéder.
L’audiologiste me fait sortir et m’explique qu’avec un tel niveau d’énergie (et d’inattention), je serais mieux servie en milieu hospitalier, où les tests avec les enfants se font en duo, ce qui facilite le tout.
Je repars donc sans résultat, mais avec un rapport décrivant la séance, mentionnant les difficultés rencontrées, destiné à mon médecin.
Heureusement, ils ont eu la gentillesse de ne pas me facturer pour un test qu’ils n’ont pas pu compléter, même si la plage horaire leur avait été bloquée.
Se tourner vers l’hôpital : entre espoir et attente
Il fallait donc maintenant passer par l’hôpital.
Après quelques transferts téléphoniques, j’ai fini par laisser un message résumant notre situation. On m’a rappelée pour me dire que nous étions sur une liste d’attente, et qu’il faudrait patienter quelques semaines, voire quelques mois.
Mode attente activé.
Trois à quatre mois plus tard, on m’a appelée pour fixer un rendez-vous pour le mois suivant. Cette fois, j’ai insisté pour que ce soit en matinée — moment où Yéyé est plus calme. On apprend de ses erreurs…
Nouvelle approche
Cette fois, je n’ai pas pris de chance : j’ai amené le Papa avec moi.
Nous sommes arrivés ensemble dans le bon département. Il y avait deux professionnelles. Yéyé, fidèle à elle-même, explorait déjà pieds nus, sautillant sur la pointe des pieds.
Comme elles étaient deux, l’une d’elles est venue dans la salle de test avec nous pendant que l’autre restait à l’extérieur pour programmer les tests.
Un système de récompense comportemental a été utilisé : lorsqu’elle répondait correctement à un son, une courte séquence de Dora l’exploratrice apparaissait à l’écran. Elle a vite compris le principe, mais l’effet motivant s’estompe après 4 ou 5 essais…
Des réponses… et encore des questions
Nous avons tout de même appris qu’il n’y avait pas de cause physique, comme une obstruction dans les oreilles, expliquant une surdité. Elle entendait relativement bien les différentes fréquences testées.
On nous a recommandé de revenir dans un an, une fois sa maturité et son niveau de collaboration améliorés, pour s’assurer qu’il n’y a vraiment aucun problème de ce côté. Pour l’instant, ce n’est pas concluant.
Pendant les explications des professionnelles, Yéyé sautillait et courait partout avec énergie. À un moment, leur attitude changea : elles étaient fascinées — ou inquiètes — par la vitesse et la vivacité de ma fille. Elle passait à deux doigts d’équipements très dispendieux.
L’une d’elles finit par nous dire qu’elle craint pour leurs instruments. Merci du conseil.
Un quotidien sous haute surveillance
Force est de constater qu’avec une telle vivacité, veiller sur Yéyé est un sport extrême au quotidien. Certaines journées, elle vit avec cette intensité pendant plus de 12 heures. Parfois plus encore.
Elle se fiche des objets fragiles, des consignes ou des interdits : la vie est trop excitante. Elle est tellement vive et curieuse.
Et encore des questions...
Une des audiologistes a aussi remarqué qu’elle sautillait constamment sur la pointe des pieds. Elle nous l’a signalé, sans y attacher d’importance particulière. Mais j’ai tout de même senti que cela pouvait être un indice.
Il nous restait, on s’en souvient, des démarches d’évaluation développementale à poursuivre.

